Hasards de la ville… Je passais ce matin rue Saint Martin et sur le trottoir de gauche entre la rue aux Ours et l’Esplanade Beaubourg, et il y avait là une toute frêle jeune femme qui s’appliquait à fixer des points d’acrylique blanc sur un petit pan de mur noir d’ébène. Saisir un l’artiste dans le moment pointu de son travail créatif. Toujours une chance.
Un pas de recul et un aperçu de l’ensemble montrent, tracé au crayon de graphite, donc noir sur noir, mais noir comme argenté sur noir mat, un réseau de fines lignes qui partent en éventail d’un point central, de plusieurs points centraux, qui s’entrecroisent, s’entre connectent, avec une précision géométrique, mathématique. Ces points de contact, ces lignes méridiennes déterminent pour l’artiste la place qu’elle attribue dans sa sensibilité du moment à chacune de ses touches de peinture blanche. Comme l’acupuncteur dont la science parfaite des méridiens énergétiques n’a cure des indications d’un manuel.
Prenons encore distance. Dès lors l’œuvre surgit dans sa globalité. Voici une sorte de cosmogonie vibratile d’où s’échappe, discrète, cette mystérieuse « Musique des Sphères » qu’évoquait vers 400 avant Jésus-Christ, le mathématicien et astronome, le pythagoricien Philolaos. Une nuée ordonnée et vivante de myriades de lucioles qui constitue une vision du monde.
Marie Lepetit, l’artiste du petit pan de mur noir, n’a que faire, à ce que j’imagine, des avancées modernes de l’astronomie en tant que science exacte. Elle est peintre avant tout et je la classerais plutôt, s’il le fallait, dans la lignée des poètes ou des grands peintres que furent Martin Barré ou Agnès Martin. Mais cette œuvre si forte et si fragile a une vraie personnalité et une unité qui signent l’Artiste.
« Memento Mori ! » Accrochée à la paroi de la rue Saint-Martin, soumise aux intempéries, aux pipis des chiens, aux graffitis imbéciles qui parfois viennent souiller des œuvres ( comme s’il n’y avait pas, ailleurs, assez de place sur des murs vierges… ) le beau travail – prévu comme éphémère par Marie Lepetit elle même - demeurera un temps dans cette rue qui fut un des grands axes de la capitale, pour enchanter les regards et donner à voir. Il faut le voir comme en lui même. Sans vouloir en extraire une « signification ». Comme le dit si justement Pierre Soulages, « sur l’œuvre, les sens viennent se faire et se défaire ». Laissons nous porter et entraîner par le regard que nous lui portons.
Enquête menée, j’ai appris que Marie Lepetit avait de mars à mai exposé des peintures et des dessins dans une galerie de la rue Quincampoix, la galerie « Briobox », née voila moins d’un an. Il y reste quelques peintures et quelques dessins. Avis aux amateurs.
« Briobox », 67 rue Quincampoix. brioboxgalerie.com ; téléphone : 0142748080.
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mercredi 4 août 2010
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