Il y a des peintres qui
marient leurs tableaux avec les brumes d’hiver et des bateaux qui s’éloignent.
D’autres qui privilégient l’ambiance triste des gares ou celle, irrémédiable, des
natures mortes, vraiment mortes. Il y a des artistes qui poussent leur art
jusqu’à la limite dernière du concept pur et sans reproche… C’est leur voie. Loin,
très loin de ces cheminements rangés et placides, avec Georges Moquay on ne court pas les risques
de la morosité ou de la monotonie… Tout chez de jeune peintre est engagement,
exubérance, vibration. Sa peinture, il la vit, la fait jaillir de ses
entrailles et de son cœur. Et il la développe sur sa toile en des myriades de
signes, de formes et de couleurs. Il déchire, comme disent (disaient ?)
les « djeuns »…
Chacun des tableaux de Georges Moquay est une fête exubérante de
la vie multiple. Chacun est aussi, sur le trajet du peintre, de l’artiste et de
l’humain, un moment de pause contenue, la mémoire frémissante de l’instant où
l’énergie se concentre et se pose du bout du pinceau. Comme née d’un arc
électrique. Les tableaux de Georges Moquay reçoivent le concentré des forces
qui se sont créées à la vitesse de l’éclair dans l’ailleurs de l’artiste. C’est
ce qui explique leur puissance, leur attractivité, leur magnétisme
communicatifs. Leurs radiations sont bienfaisantes. Elles irradient de leur
vitalité. Quelle santé !
Georges Moquay joue en
virtuose des signes qui ponctuent ses espaces. Cercles, étoiles, croix, cœurs,
fleurs, lettres d’un alphabet personnel, signes d’une cabalistique intime…
colorées, chatoyantes, ces marques sont comme les notes d’une musique endiablée
qui jazzent la musique de Docteur Whigger, Mr G. White, omniprésent. Ce
personnage étrange aux multiples visages –mais bien reconnaissable sous ses
métamorphoses et ses déguisements - est pour l’artiste, comme son envoyé
spécial, son représentant personnel, son « unique et son double ». Un
messager qu’il expédie aux quatre coins d’une planète qui n’est pas ronde mais
bosselée, accidentée, surprenante. Au Maroc, Mr Whigger porte la tarbouche, le
fez et le voilà marocain. Comme, Georges Moquay, gagné par l’atmosphère chaleureuse de
l’antique Anfa et tout imprégné par la densité des relations familiales.
Georges Moquay expose donc
à Casablanca ses dernières toiles. Flashback. Au 38 de la route d’Azemmour, à
Aïn Diab, Casablanca, la superbe et immense « Galerie 38 », dirigée
par Simo Chaoui, fait partie d’un ensemble de bâtiments hyper-modernes consacré
aux arts vivants ; théâtre, cinéma, chant, danse… Simo Chaoui, expert ès arts,
galeriste avisé et pile atomique d’énergie positive, a eu l’idée fructueuse de
convier le peintre pour une résidence de quelques semaines dans sa ville
mythique des bords de l’Atlantique. Là, dans un tsunami de créativité, Georges Moquay a peint sans relâche
et toujours avec bonheur des dizaines de tableaux. (Il a aussi, d’ailleurs,
composé plusieurs panneaux en se partageant la surface avec le peintre
Abdellatif Lasri, 100% marocain/ 100% parisien. Une rencontre riche, étonnante
et détonante). Dans sa retraite
marocaine, Georges Moquay a mis toute sa
ferveur, toutes ses couleurs, toutes les histoires et toutes les musiques qu’il
voulait délivrer. Le résultat, visible sur les murs de la Galerie 38, est fascinant.
Jacques Bouzerand
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